La polémique concernant le port de vêtements et d’objets à caractère religieux au Sénégal, en particulier celui du voile, s’intensifie de jour en jour.
Des faits qui ne datent pas d’aujourd’hui
Lors de la rentrée scolaire de 2019, l’Institution Sainte Jeanne d’Arc, une école privée catholique, avait interdit à une vingtaine de lycéennes musulmanes voilées de rejoindre leurs salles de classe. Malgré l’ampleur médiatique et étatique que cela a suscité, l’établissement n’a pas daigné revenir sur sa décision, arguant que les parents connaissaient bien le règlement intérieur concernant le style vestimentaire à adopter au moment de l’inscription de leurs enfants.
Même l’intervention de l’archevêque de Dakar et celle du directeur national de l’enseignement privé catholique n’ont pu résoudre le problème, car les sœurs de la Congrégation de Saint-Joseph de Cluny étaient déterminées à maintenir leur position. Seule l’intervention du Vatican a permis à ces élèves de reprendre les cours environ trois semaines après, à condition de porter des foulards fournis par l’établissement en lieu et place des voiles. Durant la rentrée scolaire 2024, une situation similaire s’est produite à l’établissement catholique Sainte-Bernadette, lorsqu’une élève s’est vu refuser l’accès à la classe.
Position du gouvernement sur la situation
Au mois de juillet, l’actuel Premier ministre Ousmane Sonko a vivement exhorté les écoles à reconsidérer leur position concernant l’interdiction du voile. Ce mardi 8 octobre, un décret a été publié par le ministère de l’Éducation nationale. L’article 5 du décret dispose :
« Le respect des croyances religieuses inclut l’acceptation du port de signes religieux, tels que le voile, la croix ou les perles sacrées, sans préjudice d’une identification claire de l’élève au sein de l’école, dans les classes et lors des activités pédagogiques. Ce respect de la différence ne soustrait pas l’élève, sauf dispense objectivement motivée, de la participation aux activités pédagogiques et sportives obligatoires. »
Ce décret vise à ce que les convictions religieuses de chaque élève soient respectées et ne constituent pas un frein à leur éducation.
L’école, lieu d’épanouissement et de partage culturel
La diversité religieuse dans les écoles reste un sujet qui alimente les débats. En effet, l’école se veut un espace de partage, d’ouverture et d’acceptation, où chaque élève, quelle que soit sa croyance, peut évoluer sans entrave. Les récentes mesures prises par le gouvernement marquent une étape importante dans la recherche d’un équilibre entre liberté religieuse et vie scolaire. Le nouveau décret, qui insiste sur le respect des signes religieux dans les établissements, témoigne d’une volonté de promouvoir une école véritablement inclusive au Sénégal.
Cependant, cette ouverture soulève également des questions cruciales. Ces interrogations méritent d’être approfondies, car elles touchent à la nature même de l’école : un lieu où chaque élève, quelle que soit sa religion, voire son ethnie ou son origine, doit pouvoir s’intégrer dans un environnement propice à l’apprentissage, à l’épanouissement et à la citoyenneté. L’école est un espace où le vivre-ensemble se construit à travers le respect mutuel et l’acceptation de l’autre. En cultivant ces valeurs, les élèves pourront non seulement acquérir des connaissances, mais aussi développer des compétences humaines indispensables pour une société harmonieuse.
Ibrahima Zégbé Lamah
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